samedi 6 juin 2015

Que faut-il pour écrire une fiction ?

Suite à mon dernier article, où j'affirme que le don de l'écriture n'existe pas, vous avez été nombreuses et nombreux à réagir, ici ou sur Facebook. Des réactions sensées, qui m'incitent à penser que je n'ai pas été assez exhaustif. 
Je vais donc compléter mon propos. Considérez ce nouvel article comme une préquelle du précédent (mais vous pouvez lire les deux dans l'ordre qui vous plaira, tant que vous parcourez ces lignes de gauche à droite et de haut en bas :) )

Je vais commencer par répondre à la remarque pleine de sens d'Alex Evans : oui, on parle bien ici d'écrire une fiction. Rédiger des articles de presse, des guides touristiques, des livres d'histoire ou tout ce qui n'est pas de l'ordre du roman est une autre tâche, qui ne fait pas appel aux mêmes qualités. Je ne vais pas prendre le risque de m'aventurer sur ces terrains que je ne maîtrise pas. Des milliers d'autres auteurs sauront le faire à ma place. Comme tu le disais, Alex, écrire une fiction (fut-elle SFFF ou pas, d'ailleurs) requière de l'imagination. 

L'imagination, c'est cette aptitude qu'on possède tous à transcender les frontières du réel pour créer autre chose. 
Pourtant, je vais faire ici une distinction entre l'imagination contrôlée et l'imagination débordante. On utilise l'imagination contrôlée pour rassembler des souvenirs et les utiliser pour créer une autre réalité. Que se serait-il passé, par exemple, si au lieu de prendre les maths comme matière au rattrapage j'avais pris l'anglais ? De là, je peux échafauder un scénario alternatif, admettant que je n'aurai alors pas dû redoubler ma terminale, et je vous passe le reste. Mais vous voyez le principe : ce scénario, je le bâtis sur la base d'une réalité existante dont je me souviens, et j'y pense consciemment.
L'imagination débordante, elle, s'invite toute seule. C'est elle que j'appelle "Muse". 
Puisqu'on parle de Muse, et pour répondre à Xavier, il ne s'agit pas ici de mythes grecs. J'emploie le terme "Muse" par confort, et pour personnifier le mécanisme mental qui fait que des idées me viennent à l'esprit subitement, sans que j'ai produit le moindre effort conscient pour qu'elles arrivent. Vous conviendrez que c'est plus simple dire Muse que "le mécanisme mental..."
Cette Muse est aussi envahissante qu'indispensable. Sans elle, point de fiction ! La plupart des auteurs que je connaisse sont pris d'assaut régulièrement par Muse, qui peut arriver sans crier gare à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit. Mais c'est elle qui nous donne la matière première de toute fiction : l'idée du récit. Nous sommes donc tenus de la traiter avec respect et de lui tendre l'oreille quand elle se manifeste. Si vous ne disposez pas de cette matière première, il vous sera très difficile de penser une histoire et, par voie de conséquence, d'avoir envie de la raconter. 

Il y a toutefois une chose au moins aussi importante que l'imagination pour écrire un récit : la maîtrise de la langue dans laquelle on s'exprime. Je ne parlerai pas ici de vocabulaire, déjà parce que chacun a le sien, mais aussi parce qu'il n'est pas indispensable de connaître tout le dictionnaire par cœur pour être un bon auteur. En revanche, vous ne pouvez pas vous offrir le luxe de cracher sur les bases de la langue que sont la grammaire et l'orthographe. Ne me dites pas que la grammaire vous barbe et vous a toujours barbé, ou bien que quand vous écrivez par SMS : "'lut miss, tkt sava trankill, bizz" on vous comprend quand même. 
Ici, on parle de littérature. Donc, de faire des phrases propres et construites selon les règles en vigueur, et d'orthographier correctement les mots que vous employez.
Vous n'êtes pas doué à ce petit jeu-là ? J'ai une bonne nouvelle pour vous : on apprend à tout âge ! Payez vous des Bescherelle et apprenez. Offrez vous Antidote, il corrigera une bonne partie de vos erreurs (attention, je n'ai pas dit "toutes vos erreurs". Aussi évolué que soit ce logiciel, il reste perfectible.)
Permettez-moi de vous confier un petit secret : plus jeune, je n'aimais pas la grammaire. En particulier ses termes barbares et ses formes les plus tordues. En revanche, je n'ai jamais été mauvais en orthographe. Quand je me suis mis à prendre la plume et à le faire avec soin et application, j'ai vite compris que mes lacunes en grammaire posaient quelques problèmes. Déjà à mes lecteurs, qui butaient sur mes fautes d'accord comme on se prend les pieds dans le tapis de la salle de bain le matin, quand il est un peu trop tôt. Ensuite à moi, qui n'osait plus m'aventurer trop loin dans les formes tarabiscotées, par peur de me rater. J'ai donc simplifié ma prose, presque à l'extrême, pour arriver à des phrases de type "sujet + verbe + complément." Croyez-moi sur parole, cette structure ne produit pas une littérature très riche et, encore moins, captivante.
J'ai donc pris mon courage à deux mains et me suis replongé sur le fonctionnement des accords. Sans être maître en ce domaine, je m'en sors maintenant correctement. Voilà qui me permet de varier mes structures et de ne plus avoir peur des inversions de sujet ou autres figures grammaticales qui permettent de varier les plaisirs.
Quand on écrit un récit, on s'adresse à un public. Peu importe que le lectorat se limite au conjoint, aux parents, à la tante qui vit  la campagne ou aux voisins, un lecteur est un lecteur. Le moindre des respects qu'on puisse lui témoigner, lui qui accepte de lire notre prose d'amateur, parfois hésitante et incertaine, c'est de lui proposer un récit dépourvu de fautes. À mes yeux, c'est une marque de politesse. Traitez-moi de vieux-jeu autant que vous voulez, je n'en démordrai pas.
Bien sûr, on a beau se relire attentivement, on laisse toujours passer des petites coquilles. Mais à la lecture, on ressent vite la différente entre un texte qui a été relu et corrigé, mais dont l'auteur n'a pas pu voir toutes les fautes et un texte qui n'a pas fait l'objet de la moindre attention. La densité de fautes à la ligne carrée n'est pas comparable ! Et je comprends la réaction de Magali, qui m'a fait remarquer que je n'avais pas aborder ce thème dans mon précédent article. Magali fait partie d'un comité de lecture. Elle reçoit des nouvelles à longueur d'année. Son rôle est de les lire, voir celles qui ont du potentiel ou pas, qui sont publiables ou pas. J'imagine qu'elle a autant de moments de plaisir, portée par un récit agréable, prenant et bien rédigé, que de moments de désespoir, engluée dans des lignes mal orthographiées, où les règles du français sont bafouées. 

Désolé pour ce long laïus sur l'orthographe et la grammaire, mais ça me tenait à cœur. 

Donc, que faut-il pour écrire une fiction ? De l'imagination et, pour résumer, une bonne dose d'investissement personnel. Écrire, se relire, se corriger, se faire lire, écouter les critiques - positives et négatives - prendre du recul, retravailler, améliorer, encore et encore jusqu'à ce que le récit soit satisfaisant. Ce sont des habitudes à prendre, des réflexes à acquérir.
Quand on est motivé, on s'y fait très vite. On peut même y prendre plaisir.
Dans le cas contraire, je pense qu'on passe vite à autre chose ;)

18 commentaires:

  1. "Puisqu'on parle de Muse, et pour répondre à Xavier" : eh bah t'as rien compris à mon article sur le sujet, je crois :P

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    1. Mais si , je t'ai compris. Par contre, je ne suis pas d'accord. Non que je remette en doute les vérités scientifiques que tu énonces, mais que je préfère rester sur l'idée d'une opération plus ou moins irrationnelle, semblable à un élément fantastique. Parfois, le rationnel, c'est moche :P

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    2. Et donc, pour écrire de la fiction, il faut "une muse" et "savoir sa grammaire" ?
      Pour le premier, c'est à la fois méprisant envers toi-même (tu te réduis à un outil d'une force qui t'est étrangère), mensonger quant à la réalité (la muse impliquerait que le premier jet est une merveille divine, alors que c'est souvent un étron qu'il faut remanier et remanier encore), et condescendant envers les autres (vous n'avez pas de muse ? tant pis pour vos gueules). On n'est que des écrivaillons, et parler ainsi de "nous [les auteurs à muse]", ça me fait demander si tu as un ascenseur dans ta tour d'ivoire, pour soulager des chevilles bien enflées. Si tu maintiens le lemme de muse, tu ne peux pas en même temps soutenir le discours comme quoi l'auteur n'est qu'un humain comme les autres. C'est incompatible par nature.
      Quant au second, c'est tirer un trait rouge sur ce qui fait réellement un bon texte, et qui justement se cache réellement derrière ce "muse", tout le vrai procédé créatif : travailler le rythme, la montée de la tension, les enjeux et les risques, l'appropriation des personnages, la narration au service de l'histoire, les idées originales ou originalement remodelées, réassemblées, recombinées, etc. etc. La grammaire et l'orthographe, tu peux t'autoriser quelques lacunes, les éditeurs ont des correcteurs pour ça ; mais si ton histoire n'est pas bonne, l'éditeur t'enverra bouler, et tu as tout intérêt à avoir une vraie trousse à outils pour la corriger plutôt que d'attendre que "muse" vienne à ton secours.
      Bref, je maintiens une dernière fois, après c'est cause perdue : à parler de muse, vous vous faites du tord, et vous faites du mal à l'image des écrivains en général.

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    3. Je tiens quand même à te citer la fin de l'article : "Donc, que faut-il pour écrire une fiction ? De l'imagination et, pour résumer, une bonne dose d'investissement personnel. Écrire, se relire, se corriger, se faire lire, écouter les critiques - positives et négatives - prendre du recul, retravailler, améliorer, encore et encore jusqu'à ce que le récit soit satisfaisant."
      Donc je ne pense pas avoir oublié les innombrables phases d'amélioration, de peaufinage et le long travail qui permet d'obtenir un récit qui tienne la route. Mais comme ce n'est pas l'objet central de cet article, je ne m'y attarde pas non plus.

      Ensuite, comme je le dis, l'imagination est innée. On en a tous. Donc, on a tous une Muse. Mais tout le monde n'a pas envie de lui prêter l'oreille et de se soumettre à ses caprices. Sur cette base, tout le monde est égal, il n'est pas question d'ascenseur, de tour d'ivoire ou de chevilles enflées, pas plus que de dénigrement de soi. Et si, je maintiens que l'auteur est un humain comme les autres et que l'inspiration frappe à la porte de tous les esprits du monde, mais pas de la même manière.
      Ensuite, je ne parle ici que de la matière première qui permet de concevoir un récit de fiction. Je n'ai pas parler de la faire publier, moins encore d'en estimer la qualité. Une pierre à la fois, c'est déjà bien. Pour faire un bon récit, en effet, il faut bien plus que ça. Mais l'imagination et une maîtrise correcte de la langue me semblent être des bases : indispensables et à la fois insuffisantes.
      Quant au fait qu'un premier jet soit souvent une grosse bouse, je ne suis pas tout à fait d'accord. Il contient les idées générales, l'âme du texte. À ce stade, on n'a fait qu'une petite partie du boulot, 10 à 15%. Mais l'essentiel y est.
      Je respecte tout à fait ton point de vue sur Muse, Xavier, mais je me permets de ne pas être d'accord avec ta vision. Non qu'elle soit fausse, mais qu'elle n'ait, à mes yeux, pas de charme. La part d'inconscient dans le processus de création est très importante, ce qui fait qu'elle nous paraît relever de l'envoûtement quand on la vit. D'ailleurs, tous les scientifiques qui se sont penchés dessus ont dû analyser d'autres personnes pour tirer leurs conclusions. Ils auraient sans doute été incapables de s'analyser eux-même. Toute la différence est là : tu parles du factuel, moi je préfères parler du vécu, du ressenti. Les deux existent ! Le spectacle d'un prestidigitateur n'est magique que pour celui qui le regarde et s'y laisse prendre. Pour celui qui l'analyse, il n'y a plus qu'un enchaînement minutieux de gestes, maintes fois répétés. Ne se focaliser que sur cet aspect-là, c'est se priver de l'émotion que dégage le spectacle. Ce serait dommage, non ?

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    4. Mais jusqu'à quel point est-il nécessaire de résumer ce travail créatif, puisqu'il est inconscient ? Quelqu'un qui adore lire et qui n'écrit pas saura de toute façon de quoi on parle. Et quelqu'un qui ne laisse pas de place à son imagination ne se sentira pas concerné - au point qu'il ne lira rien de ce qu'on en dira, très certainement. Une représentation est toujours une image selon le point de vue qu'on a envie de lui donner. L'exactitude, la précision ou la pertinence sont des variables qu'on ajuste selon ce qu'on veut refléter. Si tu achètes un mug sur lequel est inscrit "Muse, élue chieuse de l'année", ce ne sera pas exact, ça ne reflétera même pas le caractère essentiel de l'inspiration pour les auteurs. Mais ça en fera rire certaines et certains. Ça leur donnera envie d'acheter le mug, ce qui est la finalité de l'opération ;)
      Quant au langage, certes il faut parler le même que les lecteurs, mais le langage évolue, il change. Sinon, le français serait une langue morte. Et c'est aussi le rôle des auteurs (je me considérerai comme écrivain le jour où ce qui sortira de mon imprimante me nourrira, donc surement jamais).

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  2. Je ne suis pas certain que vous parliez de la même chose.
    En tout cas jusqu'au dernier commentaires de Francis.
    "Muse" n'est en aucun cas un don, une faculté supérieure ou autre. Pour te plagier Francis :
    "Ensuite, comme je le dis, l'imagination est innée. On en a tous. Donc, on a tous une Muse. Mais tout le monde n'a pas envie de lui prêter l'oreille et de se soumettre à ses caprices"
    La seule question au niveau de cette inspiration est de savoir si on est ou pas sensible à ce processus de création. Est-ce que notre vie quotidienne, nos observations, rencontres, discussions, etc. vont déclencher chez nous des associations d'idées et nous souffler "tiens, ça ferait bien une histoire" ou pas.
    Finalement le terme de "muse", c'est simplement : a-t-on envie d'inventer des histoires ou non ? Et c'est tout.
    Pour la suite, je rejoins totalement Xavier. Avoir cette envie de créer une histoire, c'est une chose. Maîtriser sa grammaire/orthographe est un prérequis, mais tout ça n'est rien. L'art d'écrire une bonne histoire, c'est un travail de structuration. Structure du récit, des paragraphes, phrases, rythmes, etc.
    Et tout ça se travaille, s'apprend. Comme tous les domaines, ce sera plus facile pour certains que pour d'autres, mais l'essentiel est là.

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  3. Non mais... les gars... je ne sais pas pour les autres mais quand je parle de "muse", c'est une blague... une sorte de résultat de ce qui a commencé comme une private joke.
    Je n'en reviens pas que vous en soyez à dicerter sur le sujet.
    *rires*

    Par contre, le caractère inné de l'imagination, je n'en suis pas convaincue du tout.
    Ou en tout cas, s'il n'est pas associé a un vrai développement, il est vite étouffé.
    (j'ai des cas dans mon entourage, de personnes qui n'ont aucune imagination, et ne supporte pas tout ce qui bouscule leur vision terre-à-terre / pratique, car elle ne savent pas y adhérer)

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    1. ("ne supportent pas", désolée pour la coquille)

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    2. Je trouve que c'est justement parce que des gens ne savent pas avoir d'imagination qu'il est important de ne pas utiliser ce terme. L'imagination se travaille, s'alimente, se construit avec le temps, et utiliser "muse" face à quelqu'un qui n'a pas fait ses efforts, c'est implicitement lui dire qu'il n'aura jamais cette faculté.
      C'est exactement comme les blagues sur les blondes. C'est pour de rire, mais ceux qui les racontent ne réalisent pas les effets de bord que ça peut avoir :)

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    3. J'avoue que je ne me prends pas trop la tête avec ça. Vu que je ne prends pas les lecteurs de mon blog / ma page FB / mes fils de challenge CoCyclics pour des idiots (et que la plupart me connaissent), je sais pertinemment qu'ils traduisent très bien, quand je me moque de "muse", que je me moque d'une partie de moi-même (celle qui a méchamment tendance à partir dans tous les sens ou à briller par son absence).
      Car si je suis bien d'accord avec toi (je suis encore en train de lire ton article, je n'ai pas fini : il est hyper intéressant) c'est que l'inconscient agit beaucoup sur la créativité. Je pense que tout le monde traduit bien, quand je parle de "muse", que c'est en grande partie de lui que je parle.
      Evidemment que je ne crois pas qu'une "vraie" muse se penche sur mon épaule pour me souffler des idées / envies, m'aider à résoudre mes problèmes, me pousser à passer un projet en priorité à un moment donné.
      De toute façon, je suis agnostique. ^^
      Je ne vais pas arrêter de mentionner ma muse, c'est une façon pour moi de dédramatiser toutes les emmerdes que je dois surmonter dans le long et fastidieux process qu'est l'écriture. Que tu mettes mes références à une muse imaginaire sur le même plan que les blagues sur les blondes, ça me sidère en peu... ;)

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    4. J'ajoute que cet argument là ne me convainc pas :
      "L'imagination se travaille, s'alimente, se construit avec le temps, et utiliser "muse" face à quelqu'un qui n'a pas fait ses efforts, c'est implicitement lui dire qu'il n'aura jamais cette faculté."
      Car ce n'est qu'une question de vocabulaire. Replacer "imagination" ou "créativité" dans le contexte à la place de "muse" ne changera rien : celui qui ne les a pas / pas assez travaillé / s'est bridé par son éducation pourra toujours en déduire qu'implicitement on estime qu'il n'en aura jamais.
      Ce n'est pas un mot, un terme, qui va changer le ressenti de quelqu'un dans un contexte donné, en fonction de ce qu'il interprête.
      Par contre, dire haut et fort que oui, on croit que la créativité ça se travaille à tout âge, ça ça peut aider. Et utiliser l'image de muse en train de se nourrir ou de se muscler est une façon comme une autre de l'imager. Ce qui compte n'est pas autant la façon dont c'est dit que le message passé et la façon dont les gens se l'approprient (et quand ils ont décidé de se l'approprier de travers, il n'y a pas grand chose à faire...). ;)

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    5. Tu remplaces allégrement "créativité" par "muse" car pour toi, ce sont des synonymes. Mais si tu étais face à quelqu'un qui n'a pas cette association dans son bagage culturel, parler de muse, c'est nier le travail nécessaire.
      Dans la langue commune, la muse, c'est l'inspiration divine, point barre. Tu prends un type lambda dans la rue, tu lui parles de muse, il va pas penser "créativité à travailler", il va penser "génie créatif", ou "don inné" (c'est le sens qu'on trouve dans le dico). Les créatifs savent qu'il n'en est rien, pas les autres personnes.
      Tu ne peux pas dire "parce que pour moi, c'est pareil" que le glissement de sens est vrai pour la majorité de la population.

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    6. Ton raisonnement est juste Xavier, mais j'y vois quand même deux détails :
      1- le travail en question est pour bonne partie inconscient. Je n'ai pas la sensation de travailler pour avoir des idées. Pour leur donner forme, évidemment, c'est tout à fait autre chose.
      2- Ok, on fait un contresens. Mais en utilisant le terme "Muse" tel qu'on le fait, on lui donne un nouveau sens. Les gens qui lisent les posts FB de tous les auteurs qui parlent de Muse - et il y en a une sacrée ribambelle - comprennent, à force, de quoi on parle. Et vu qu'on en parle le plus souvent pour dire qu'elle vient perturber nos travaux en cours, ils vont finir par lui donner l'image "truc casse-pied mais indispensable pour les auteurs dont je suis la page FB" ;)

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    7. Tu n'en as pas conscience car le travail est en amont, durant toutes les heures où tu te nourris d'autres idées, quand tu lis par exemple.
      Et justement, résumer tout le travail créatif à la muse et donc à ce fameux déclic inconscient, c'est réducteur. Soyons honnête : une idée qui surgit d'un coup, si tu l'utilises aussitôt sans recul, t'as 99% de chance d'avoir un texte à chier.
      Quant à donner un nouveau sens à "muse", c'est surtout prendre le risque de se gameller dans la transcription de vos idées, surtout vis-à-vis d'un lecteur de passage. On est écrivain, non ? On est censé savoir parler le langage du lecteur, pas l'inverse :)

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    8. Xavier, tu oublies juste un détail : je ne parle pas de "muse" avec un type lambda dans la rue... Et au fond, si les gens déduisent quand je parle de "muse" que je nie mon propre travail / mes propres facultés, j'avoue que je m'en fiche un peu. Il y a tellement d'autres trucs que les gens déduisent sur moi qui m'incommodent bien davantage. En plus, la plupart des gens sont vraiment incapables d'appréhender le processus créatif d'un écrivain, j'évite d'en parler avec les non-auteurs (je me suis assez cassée les dents à essayer d'expliquer aux membres de ma famille, ça ne sert à rien, il vaut mieux leur fournir le texte édité, là ça leur parle).
      Je suppose que c'est une question de sensibilité personnelle, je comprends ce que tu veux expliciter et en quoi ça te touche, c'est juste que ton combat 'anti-muse' n'est tout simplement pas le mien. ;)

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  4. Pour Muse, sans le côté Private Joke dont parle Roanne, je suis également sur l'aspect "mettre un nom sur un processus cérébral complexe".
    Quant à l'aspect inné, désolé mais si : c'est inné.
    Par contre, c'est vrai que ça s'entretient. Ce qui explique pourquoi certaines personnes perdent cette faculté avec le temps. Mais à la naissance, quand on est encore de petites créatures fripées d'environ 50 cm de long, on est tous dotés d'imagination (ce qui est dommage, c'est que c'est à ce moment-là qu'on en a le plus, mais on n'est pas encore capable de la transformer en récits ^^ )

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    1. L'imagination innée qu'on a gamin est inutilisable. On confond souvent la faculté de croire des enfants avec la faculté d'imagination.
      J'argumenterai avec cette superbe BD : http://www.bouletcorp.com/2007/12/11/fuck-peter-pan/

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    2. Merci pour ce lien Xavier ! il reflète exactement mon ressenti. Les enfants ont la faculté de croire, mais pas forcément celle d'imaginer. Ils peuvent se plonger à pieds joint dans un univers puis petit à petit apprendre à l'enrichir, mais ils ont d'abord besoin de s'en nourrir. D'où l'importance de ce que leur famille partage avec eux...
      Du coup, pour le caractère inné, je ne suis toujours pas convaincue.
      Après, on a peut-être une faculté innée de développer plus ou moins dans un milieu donné, selon les stimulis, mais je ne suis pas assez pointue sur le sujet de la génétique pour creuser (et vu les dernières découvertes dans le domaine, les évolutions qu'il reste à faire, on va encore en apprendre de belles, je suppose).

      Bref, continuons à nous nourrir, à le restituer de 1001 façons et à le partager avec les mioches ! ;)

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