samedi 16 mai 2015

J'ai lu : Docteur Sleep par Stephen King.




Je ne dirais pas que ça faisait longtemps que je n'avais pas lu un Stephen King, ce serait vous mentir. En revanche, ça faisait longtemps que je n'avais pas collé de plus ou moins près à l'actualité littéraire du Maître. La dernière fois, c'était pour Insomnies : sitôt trouvé en rayon, sitôt acheté, et presque sitôt lu. Bon, à l'époque, ma PAL était loin de me menacer d'ensevelissement.
Qu'est-ce qui m'a décidé pour Dr Sleep plutôt que 22/11/1963 ? Peut-être une simple question de format. Docteur Sleep est un pavé, 22/11/1963 une pierre de taille. Le dernier King un peu long que j'ai lu m'avait laissé une sensation de ventre mou, en plein milieu. J'avais un peu peur que ce soit à nouveau le cas.

Je vais tâcher de ne rien vous révéler sur les histoires et sous-histoires narrées par le Maître, parce que je m'en voudrais de vous gâcher le plaisir de la découverte de ce sublime roman. Car oui, ce roman est excellent, n'a aucun ventre mou et, quand on est plongé dedans, c'est comme s'il était aimanté à nos mains, magnétisant nos yeux. 

King a trouvé la méthode parfaite pour éviter les flashbacks et les Deus Ex : il raconte les moments de la vie de ses personnages qu'on a besoin de connaître dès le début, ce qui nous permet de nous familiariser avec eux tout de suite, de nous mettre à les apprécier ou à nous méfier d'eux et, surtout au début, de nous souvenir que le personnage de Dan Torrance vient d'un plus ancien roman intitulé The Shining. On entre ainsi peu à peu dans la vie de Dan, qui a survécu au même titre que sa mère. C'est un plaisir de le retrouver encore enfant, à peine plus vieux et King sait y faire pour nous rafraîchir la mémoire sans alourdir sa prose.



Peu à peu, les personnages se dévoilent. Les liens se créent en douceur, les années passent et le titre du livre nous est expliqué vers la fin du premier tiers. La lecture est toujours plaisante, le style de King, riche en verve et en images, fait mouche. Tout est fluide, on entrevoit ce qui va se dérouler, le lecteur se pose dans les starting blocks, prêt à l'accélération.

C'est à partir de là que le livre s'est rivé à mes mains. Jeudi dernier, vu que mon chat m'avait clairement signifié qu'il ne me laisserait pas écrire, je me suis mis à lire. Sur cette seule journée, j'ai dévoré un peu plus de 400 pages de ce roman (je l'ai lu en format poche, il en fait 760.) Partie après partie, chapitre après chapitre, j'étais en immersion dans le monde de King. Je voyais Teenytown et son petit train. J'imaginai les visages de Dan, Billy, du Docteur John - qui n'est pas le docteur sleep, c'est à peu près la seule information que vous tirerez de moi - d'Abra et de ses parents. Je voyais aussi très bien Rose Claque et tous les gens du Noeud Vrai. Et surtout, je vivais ce qu'ils vivaient avec une intensité exceptionnelle. Rarement livre m'avait autant agrippé par tous les atomes de mon être. 

King ne mise plus tant sur la peur et l'horrible qu'avant. Il joue aussi avec des sentiments plus doux, mais pas moins efficaces, bien au contraire. On s'attache tellement à ses personnages qu'on espère sincèrement qu'il ne leur arrivera rien d'atroce. Parce qu'on sait aussi, quand on a l'habitude de King, que s'il veut se lancer dans l'horrible, la torture et l'angoisse, il y arrivera sans mal !

L'histoire est à la fois prévisible dans ses étapes et sa progression globale - et aucun doute possible : c'est voulu - et en même temps, riche de rebondissements, de détails qu'on ne voit pas venir mais qui changent tout. Pourtant, tous les éléments sont là ! L'auteur nous a dit tout ce qu'on a besoin de savoir, aucun élément n'arrive à la dernière minute, en mode Deus Ex Machina. Non, on a tout. Mais on n'a rien vu venir quand même. 



Le seul bémol que je vais apporter à mon plaisir de lecture (très léger bémol, mais il existe quand même) concerne la fin. Je l'ai trouvée trop facile, en fait. C'est vrai que j'avais peur qu'il arrive malheur aux protagonistes auxquels je m'étais attaché. Mais si ç'avait été le cas, ça ne les aurait rendu que plus attachants encore ! Or là, il me semble que, malgré tout, ils s'en sortent avec un peu trop de facilité. Je ne dis pas que c'est une promenade de santé pour eux, mais de mon point de vue, ça aurait pu, ça aurait dû être un peu plus corsé.

N'en demeure pas moins que la fin fait du bien, King ferme les portes une à une, nous laisse avec des personnages grandis, enrichis, une page de leur vie se clôt quand d'autres se dévoilent. Il aurait matière à nous raconter encore d'autres histoires avec eux, s'il le souhaitait. J'ignore s'il le fera, mais le cas échéant, je les retrouverai avec plaisir.

Docteur Sleep est un roman maîtrisé, d'une fluidité peu commune, servi par un King qui a gagné en sensibilité sans sombrer dans la sensiblerie. Il sait toujours nous montrer les vies les plus belles mais aussi les plus poisseuses, nous emmener dans des univers glauques, malsains et nous les faire traverser sans qu'on perde leur parfum particulier. On vit ce roman plus qu'on ne le lit, on plonge dans son histoire tellement facilement que c'en est magique. Même si j'aurais aimé une fin plus corsée, plus hardue, ce n'est qu'un tout petit bémol accidentel et non sollicité au milieu d'une symphonie magistrale et envoûtante. 


Comme moi, ce chat est captivé !

À lire, tant pour ceux qui connaissent King que pour ceux qui ne le connaissent pas et souhaitent le découvrir. Et même si vous n'avez jamais lu ni vu The Shining, aucun problème, ça ne vous gâchera pas le plaisir. Je ne vois pas ce qui pourrait vous le gâcher, d'ailleurs ! 


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