lundi 2 novembre 2015

J'ai lu : Le Roi Des Fauves par Aurélie Wellenstein.

Cette superbe couverture est signée Aurélien Police.


Accusés de meurtre, Ivar, Kaya et Oswald sont injustement condamnées à un sort pire que la mort. Enfermés dans un royaume en ruine, coupés du monde, il leur reste sept jours d'humanité. Sept jours pendant lesquels le parasite qu'on leur a inoculé va grandir en eux, déformant leur corps et leur esprit pour les changer en monstre, en berserkirs, ces hommes-bêtes enragés destinés seulement à tuer ou être tués. Commence alors une course contre le temps, effrénée, angoissante, où les amis d'hier devront rester forts et soudés, pour lutter contre les autres... et surtout contre la bête qui grandit en eux. 
Existe-t-il une issue ? Existe-t-il un salut quand son pire ennemi n'est autre que soi-même ?



Voilà bien longtemps que je n'avais pas lu un roman de fantasy. Le dernier en date était "Les Derniers Parfaits", de Paul Beorn, que je vous conseille au passage.
L'analogie s'arrête ici. Hormis le registre, les deux romans n'ont rien à voir. Aurélie Wellenstein n'a jamais fait mystère de son penchant pour les univers sombres et torturés. Mais s'agissant d'un roman destiné aux jeunes adultes, je me demandais si l'auteur n'avait pas dû brider sa plume, prompte à nous plonger dans des ambiances cauchemardesques.

Fort heureusement, il n'en est rien ! Les jeunes gens qui sont le lectorat cible de Scrineo ont intérêt à avoir l'estomac bien accroché. Passé une introduction courte et efficace, qui nous plonge dans ce monde où l'équité n'a pas encore été inventée, un système médiéval assez simple à comprendre et tout à fait réaliste, Aurélie nous plonge dans l'angoisse. Cette attente est bienvenue, elle permet de faire plus ample connaissance avec les protagonistes et déjà de s'attacher à leur sort.

Sans rien révéler de l'histoire, car je ne veux pas vous spoiler, je peux vous dire qu'elle est bien amenée. Les trois héros, Ivar, Kaya et Oswald sont convaincants, bien à leur place de jeunes gens pas encore adultes, confrontés à une réalité dont ils ignoraient tout. J'ai beaucoup aimé Ivar, son courage mêlé d'une certaine maladresse en fait un personnage très plaisant à suivre. Oswald m'a plu par son humour noir et ses efforts pour masquer ses faiblesses. Quant à Kaya, elle reste mon personnage préféré dans cette histoire. J'adore son caractère, qu'on découvre au fil des pages sous l'e regard d'Ivar, seul personnage de point de vue du roman. Mention spéciale pour le jeune Jarl, à la fois admirable par sa ténacité et exécrable dans son attitude. Un personnage comme on aime les détester.


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La couverture, vue dans son intégralité, aussi réussie que le roman qu'elle illustre.


Dès que les trois jeunes gens se retrouvent dans le Hadarfell, les événements se bousculent. Il y a d'abord ce mythe, institué par l'auteur, auquel j'ai mis du temps à croire. J'ai longtemps pensé à un piège, une simple chimère créée de toutes pièces dans un but de contrôle, de domination. Mais l'auteur m'a pris par surprise, une fois encore, en donnant vie à cette croyance, mais aussi en lui donnant un contre-pouvoir tout aussi effroyable. C'est que le Hadarfell a une histoire tourmentée, on la découvre à mesure que les jours s'écoulent, et que les Lehrings produisent leur effet. Et ceux-ci sont impressionnants, plongeant les trois amis dans les abîmes de leur propre esprit. La part d'humanité de chacun d'eux s'amenuise, laissant place à la bête qui sommeille en eux. L'ambiance devient plus pesante, le stress monte et les jours s'écoulent très vite. Le style fluide et percutant d'Aurélie fait merveille et nous immerge totalement dans les ténèbres de cette forêt obscure, chevillés au destin des trois adolescents dans ce monde dur et parfois sanglant.

L'influence de la magie, noire de préférence, est incontestable mais bien dosée. De telles puissances pourraient réduire les personnages à l'état de pantins, pourtant ils luttent et conservent toujours une part de conscience en eux, même aux pires moments. Les sentiments qu'ils développent sont puissants, parfois contradictoires et touchent le lecteur en plein fouet. C'est aussi à ça qu'on reconnaît un très bon roman : on le vit autant qu'on le lit. 

Vient alors le moment de découvrir ce qui se cache derrière le titre de cet excellent roman, le Roi des Fauves. À nouveau, je ne veux rien vous révéler de l'intrigue. Elle est bien tissée, mêlant de façon habile ce à quoi on s'attend depuis que ce personnage étrange est évoqué, et quelques surprises bien amenées, qui font toute la différence. Quant à la fin de l'histoire, elle est à la hauteur du roman, étonnante, décapante et sans concession. 

La reine des fauves et ses récompenses :) 


On dévore les 284 pages de cette histoire avec un vrai plaisir, on sombre dans la noirceur du Hadarfell en se demandant comment on peut en revenir. Au-delà de l'histoire principale, mise en lumière par le 4ème de couverture, on découvre un royaume avec ses légendes, son passé et ses conséquences. La plume habile d'Aurélie Wellenstein amène tous ces éléments petit à petit, sans jamais nous laisser le temps de nous ennuyer. Une vraie réussite, qui mérite amplement son prix des Halliennales 2015 et, je l'espère, quelques autres dans l'avenir.



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