vendredi 24 octobre 2014

Le premier jet : point A, point B, point final :)

Récemment, avec d'autres auteurs, on a beaucoup parlé des premiers jets de roman. Comment faire, quand se lancer, doit-on faire lire ses extraits par les autres afin d'obtenir des avis critiques pendant la rédaction... Beaucoup de questions et de hantises planent autour de ce moment crucial qu'est l'écriture d'un roman.

Chacun a sa méthode, ses trucs et astuces. Ce qui compte, finalement, c'est le résultat.

Dans cet esprit, je vais vous expliquer la mienne, ce qui fonctionne ou ne fonctionne pas quand je me met à écrire un roman.

Phase 1 : préparation.



Chez moi, c'est une étape très intériorisée. Je laisse gentiment mes idées se développer dans un coin de ma tête, je les ressasse un peu, en gros je fais bouillir la marmite. En général, mon idée de départ est une image fixe, ou une séquence très courte que je me représente comme un film qui aurait la durée d'une publicité. 
Si je voulais lui trouver une formulation, ça prendrait la forme d'une question, commençant par "et si..." 
Les semaines passent, puis les mois s'enchaînent, et ma question "et si..." trouve ses réponses. Les personnages se dessinent dans mon esprit, le film s'étire, l'idée se complète. À ce moment-là, je prends des notes. Rapidement, j'ébauche un plan du roman, où se dessinent les grandes phases.
C'est en général à ce moment-là que les failles deviennent visibles. Il me manque des éléments pour que le plan soit complet et que l'histoire puisse s'écrire, ce dont je n'aurais pas eu conscience sans plan. La réflexion se poursuit donc pendant le temps nécessaire à ce que les grandes lignes de l'histoire soient clairement tracées, que les axes narratifs apparaissent. 
Difficile de dire combien de temps il faut pour parvenir à ce plan complet, ça varie selon la complexité de l'histoire, mon inspiration, et le temps que je peux consacrer à y réfléchir. Mais pour vous donner un ordre d'idée, ça se compte en mois.

Phase 2 : écriture.



Maintenant que tout est prêt, je peux me lancer dans la rédaction. L'essentiel est de trouver un créneau de plusieurs semaines consécutives pendant lesquelles je vais écrire presque tous les jours. 
Le but de la manœuvre va être d'écrire en un minimum de temps le roman dont j'ai tracé le plan. Dès lors, mon PC devient le lieu d'une course. Il y a le point A, le premier mot du roman. Quelque part, plus loin, il y a le point B, qui est le mot "FIN" que j'apposerai au bas du roman. Entre les deux, il ne doit y avoir que mon clavier, mon écran et mes doigts.
Point A, pont B, point barre !
Quand je suis lancé, à moins d'un gros coup de fatigue - écrire un roman, ça épuise ! - je ne m'arrête pas. Mon premier jet n'est pas le meilleur que j'ai pu lire, mais il est authentique, chargé de toute l'énergie que je peux y mettre. Il est frais, riche des idées que j'ai notées et complétées. Mais il a des failles. Je pense que tout premier jet contient des failles.
Si je m'y arrête, alors que mon esprit n'a envie que d'écrire la suite, je vais perdre le fil et la magie va se rompre. 
Point A, point B, point barre !
Rappelez-vous que cette méthode fonctionne pour moi, mais pas pour tout le monde. La difficulté consiste à oublier les doutes, à cesser de réfléchir à la structure du roman. À faire une confiance aveugle à Mme Muse. 

Avantages de la méthode :



Ce système a quelques aspects positifs que j'adore :

1- je n'écris pas mon roman, je le vis. 
Lorsque j'écrivais la fin d'Essence d'Asphalte, en plein mois d'août, je me suis attaqué à une scène qui se déroule en Février. Je me suis tellement immergé dedans que, quand ma séance d'écriture s'est achevée, j'ai pensé qu'il fallait que je me couvre parce qu'il allait neiger de hors. La réalité du récit et celle du monde réel s'étaient simplement confondues. Croyez-moi, ce genre de moment est un pur délice, une expérience unique mais qu'on peut reproduire. La seule condition, c'est de cesser de réfléchir à autre chose qu'aux phrases qu'on écrit, se laisser porter par l'inspiration. Essayez, vous verrez ;)



2- mon premier jet est très vite achevé.
Pour Essence d'Asphalte est ses 320K SEC, il m'a fallu sept semaines. Mais en réalité, seulement cinq. Parce que j'ai eu un monstrueux coup de fatigue à la mi-juillet, et que je me suis pris deux semaines de vacances pendant lesquelles je n'ai pas touché mon clavier. Pour un précédent roman, que j'ai écrit entre 2010 et 2011, il m'avait fallu un peu moins de quatre mois pour aligner 897.000 SEC. N'y voyez pas une simple volonté d'aller vite pour aller vite, même si la vitesse a toujours un côté grisant. Je vais vite pour que l'inspiration n'ait pas le temps de se dissiper, que les idées restent aussi pures que possible.


3- Le premier jet n'est pas si mauvais.
On pourrait croire qu'une frappe au kilomètre produit des premiers jets un peu ratés, mal foutus, qui ne tiennent pas vraiment la route. J'étais même le premier à penser ça. La relecture d'Essence d'Asphalte me donne tort. Même après une première relecture à chaud, il reste encore beaucoup de travail sur ce roman. Mais il fonctionne, il accroche bien. L'essentiel est là. Il a le goût brut et fort des choses qu'on a fait avec passion. Comme un camembert moulé à la louche - à ne pas laisser traîner au frigo, par peur que son odeur se répande sur les autres aliments !


Il ne reste plus qu'à l'affiner, en garder le bon et le très bon, en retravailler le moyen et en retirer le mauvais. C'est le moment de se poser des questions. C'est le moment d'exprimer ses doutes, de les analyser, et de solliciter l'aide des bêta-lecteurs. 
J'en suis arrivé à ce moment-là. Je suis bien content d'avoir laissé mes doutes au vestiaire, car tous n'étaient pas justifiés.

Je finirai cet article par un aveu : j'ai hâte d'entamer mon prochain roman. Il commence à être bien mur, les personnages remuent dans ma tête. Si tout va bien, je pourrai l'écrire à partir de Février :)



3 commentaires:

  1. Excellente méthode que voilà, qui t'a très bien réussi (et à moi aussi, tiens) !

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    1. Oui, je pense que cette méthode est parfaite pour des auteurs comme nous ;)

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  2. J'adore cet article !! Passionne et passionnant.
    Pour ma part je fais à peu près pareil sauf que je mets plus de temps pour tout (je fais escargot avec mon tome 1 écrit en 4 ans. :-p ).
    Mais avec le Nanowrimo j'expérimente cette technique et ça me plaît ! :D
    À bientôt!

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